#Bure : les opposants au projet de stockage ont « repris le bois ! »

Bure, 10 h, sur la place du village, briefing. Michel, le porte-parole des différents collectifs en lutte contre Cigéo détaille l’action du jour : « On va reprendre le bois et installer des cabanes, des barricades pour renouveler durablement l’occupation du site et l’intensifier », dit-il.

Autour de lui, la ruche qui a investi la Maison de la Résistance se prépare à faire mouvement vers une colline placée aux avant-postes des 220 hectares de la forêt de Mandres et de la parcelle du bois Lejuc. La veille au soir un bivouac musical s’était tenu sur ce point haut, histoire de gonfler le moral des troupes. Pour les épauler, les activistes de la région ont reçu le renfort d’un car d’une soixantaine de militants engagés contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Une montée en puissance car le 7 juillet les premiers occupants avaient été expulsés de la chênaie-hêtraie par un dispositif musclé de forces de l’ordre. Mais il en faut plus pour entamer la détermination des opposants au projet d’enfouissement de déchets hautement radioactifs à durée pluri-millénaire.

Dans ce coin de la Meuse profonde, près de 20 ans d’hostilité anti-poubelle nucléaire, ça pèse. Alors ni la décision du TGI de Bar-le-Duc qui, le vendredi précédent, a débouté un référé déposé contre l’ordonnance d’expulsion, ni le vote du lundi 11 juillet dernier qui autorise le lancement d’une phase pilote de Cigéo au bois Lejuc par une vingtaine de députés perdus dans l’hémicycle ne changera la donne, bien au contraire. « Un débat parlementaire en catimini a validé un projet qui va coûter 6 milliards d’euros ! », gronde Laura du Réseau sortir du nucléaire. Souvent évoqué par ses défenseurs, l’argumentaire de la réversibilité du stockage est battu en brèche : « C’est un mythe, un mensonge de plus, un moyen fallacieux d’acceptabilité sociale », tranche Martial, prof de physique en retraite venu de la Sarthe.

Les gaz…

Midi, la chaleur et la tension montent. Sur la colline, ils sont environ 500 à observer la ligne bleue des uniformes et les visières des casques de la gendarmerie mobile déployées en lisière du bois Lejuc, en contrebas. 13 h : entre les blés mûrs, sur le chemin pierreux d’une ancienne voie romaine qui s’incline vers le thalweg, le cortège s’élance au son de l’accordéon et des « Andra barre-toi ! ». Deux tracteurs aux fanions de la Confédération paysanne ferment la colonne. « La Conf’ne sera bientôt plus seule dans la contestation », affirme Rémy, un Meusien, « le monde paysan et notamment le syndicat des Jeunes agriculteurs de la Haute-Marne et des Vosges commence à comprendre l’entourloupe. Outre les forêts, l’Andra a acheté 1.000 hectares de terres agricoles sans déclaration d’utilité publique. Pour en faire quoi ? ». Vers 13 h 30, contact. Des projectiles fusent, les militaires ripostent à coups de grenades lacrymogènes et assourdissantes. Une escarmouche, car les activistes s’éclatent en plusieurs groupes pour dénicher une brèche dans les 7 kilomètres de lisière. Cette stratégie spontanée va payer.

Vers 15 h, une cinquantaine d’intrépides parvient à forcer le verrou en se faufilant sous les frondaisons. La forêt résonne d’appels et de détonations de grenades. Beaucoup de militants visiblement rompus aux guérillas zadistes ont revêtu la tenue idoine. Masques à gaz, casque, genouillères ou visages masqués. Durant plusieurs minutes, la situation est indécise. Puis, une onde de joie secoue les rangs des assaillants : la gendarmerie et les vigiles de l’Andra se replient. Le champ est libre. En fin d’après-midi, 350 activistes ont repris possession d’une clairière. « Nous venons d’installer la cantine collective. On construit des cabanes, on dresse les tentes pour la nuit… », rigole Sylvestre, l’un des lieutenants des collectifs. « Maintenant, il va falloir tenir… ».

Patrice COSTA

Source: Bure : les opposants au projet de stockage ont « repris le bois ! »

 

Lire également le communiqué de presse des équipes médicale et juridique du mouvement d’occupation du Bois Lejuc sur les violences subies par les manifestant.e.s

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