En France, les entreprises corrompues "ne sont pas du tout poursuivies"

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Invité de la matinale de France Inter ce mardi 12 juillet, Pascal Saint-Amans, le directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l’OCDE, a rappelé l'urgence à lutter contre la corruption et l'évasion fiscale. Le projet de loi Sapin 2 « pour la transparence de la vie économique », adopté par le Sénat vendredi dernier, s'apprête justement à être examiné en commission mixte paritaire.

Alors que le projet de loi Sapin 2 « pour la transparence de la vie économique » a été adopté par le Sénat ce vendredi 8 juillet et qu’il s’apprête à être soumis à une commission mixte paritaire chargée d’en établir une version finale, Pascal Saint-Amans, le directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l’OCDE, a rappelé ce mardi 12 juillet sur France Inter l’urgence à agir en la matière. 

Car en ce qui concerne la corruption, et notamment la corruption d’agents publics à l’étranger – qui permet aux entreprises d’obtenir des contrats à l’international en échange du versement de commissions occultes -, il y a encore beaucoup à faire, en particulier en France. L’Hexagone « est dénoncé régulièrement par l’OCDE pour n’être vraiment pas bon dans ce secteur », a en effet expliqué le monsieur fiscalité de l’OCDE. Et de poursuivre : « Il y a très peu de poursuites, il y a même pas du tout de poursuites d’entreprises françaises, et je doute que les entreprises françaises ne fassent pas un peu de corruption à l’étranger pour avoir des marchés ». 

Très peu de poursuites, c’est le cas de le dire. De fait, en quinze ans, aucune entreprise tricolore n’a été condamnée en France bien que certaines aient fait l’objet de procédures judiciaires et de condamnations ailleurs dans le monde. Aux Etats-Unis par exemple, où ont été épinglées Total en 2013 pour ses pratiques en Iran, Alcatel en 2010 pour des affaires conclues notamment en Amérique latine ou, plus récemment, Alstom en raison d’un juteux marché signé dans le domaine de l’énergie en Indonésie.

Des nouvelles armes contre l'évasion fiscale

Si Pascal Saint-Amans n’avance pas de mesures concrètes pour y remédier, il revient en revanche longuement sur la lutte contre l’évasion fiscale, et plus exactement sur la question des lanceurs d’alerte, mise en lumière une nouvelle fois en avril dernier par l’ouverture du procès LuxLeaks, au Luxembourg. Un procès, rappelons-le, qui a abouti des deux employés à l’origine de l’affaire.

Il est « important de protéger » à l’avenir les lanceurs d’alerte, insiste Pascal Saint-Amans. « Je crois que la loi Sapin 2 (qui prévoit pour la première fois un statut pour ces derniers, ndlr) va dans cette direction », ajoute-t-il. Quant à l’évasion fiscale en tant que telle, il se réjouit que l’ensemble des pays du G20 aient adopté, en novembre 2015, une série de mesures dont le reporting pays par pays, qui va « obliger les multinationales à déclarer aux administrations fiscales où est leur chiffre d’affaire, où sont localisés leurs profits » ou encore, « où sont leurs employés ».

A l’heure actuelle, on estime à 11% du PIB mondial le montant des sommes cachées dans les paradis fiscaux, soit « un enjeu fiscal pour les états de l’ordre de 250 milliards d’euros par an », souligne Pascal Saint-Amans. Or, « qui en supporte la charge fiscale ? » Le contribuable, qui va « payer de la TVA, payer de l’impôt sur le revenu, alors que ce qu’on appelle les facteurs mobiles de production, les multinationales, ne paient pas leur quote-part… »

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