Comment Gazette Debout s’est infiltrée dans un meeting ultra privé du parti socialiste

MeetingPS

Camera
Nura 2
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1/20s
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1113
Gazette Debout / DR

REPORTAGE CHEZ LES SYMPATHISANTS PS. Mercredi 100 mars, Nuit Debout nous avait donné rendez-vous au 15, rue de l’Aubrac, à Paris-Bercy, pour manifester devant le meeting organisé par les ténors du PS aux salons de l’Aveyron. À la sortie du métro Cour Saint-Emilion, environ 200 activistes (CGT comprise) sont bloqués par un cortège de CRS.

CRS
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Résolue, je grille la foule pour assister au meeting, en mode curieuse et pacifiste. Qu’ont-ils de si important à se dire ? Pour rentrer, il faut avoir reçu une invitation et être muni de sa carte d’identité. Montrer patte blanche en quelque sorte… J’y parviens.

Devantlemeeting
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Dans la salle, il n’y a guère plus de militants socialistes qu’il n’y avait de personnes à la sortie du métro.

foulemeeting
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Assistance
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En revanche, beaucoup de personnels de sécurité et énormément de caméras. Je reconnais France 2, Le Petit Journal, Le Grand Journal…

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Gazette Debout / DR
MICROS
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Introduction : « Il faut saluer l’initiative de Monsieur Valls et M. Cambadélis de nous réunir ce soir. Le moment est bien choisi ». Applaudissements. Stéphane le Foll, ministre de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt et porte-parole du gouvernement, est le premier à monter derrière le pupitre. « Il est important de se rassembler pour saluer Myriam, rappeler qui nous sommes. Fallait-il avancer dans le choix de la négociation en entreprise (article 2 *) ? Est-il contraire à nos valeurs ? Moi, je dis que ce choix est important à un moment où, souvent, on entend qu’en France, le taux de syndicalisation est très faible. La meilleure façon de renforcer le rôle des syndicats est de faire en sorte que la négociation se rapproche des salariés. » Avec cet argument, on comprend mieux pourquoi la CGT est vent debout. Stéphane le Foll voudrait retirer le pouvoir de la négociation patrons/employés aux syndicats, sous couvert de l’accorder à d’autres acteurs, s’y prendrait-il autrement ?

Myriam El Khomri
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Suit Myriam El Khomri, ministre du travail : « Je suis très heureuse de pouvoir parler avec vous de cette loi qui porte mon nom et sera débattue dès lundi prochain au Sénat. Cette loi pose les bases du discours social. La France a une qualité, qui est aussi son défaut : un goût immodéré pour l’autocritique. Permettez-moi de ne pas succomber au brainwashing. De regarder mon pays tranquillement, lucidement ».

Permettez-moi aussi, madame, de résister au lavage de cerveau que j’ai un peu l’impression de subir. Vu la mobilisation contre votre projet de loi, le nombre de manifestations, gazages, arrestations, émergences de mouvements contestataires (Nuit Debout dans toute la France, par exemple)… et étant donné que votre loi est passée via le 49.3 (un « déni de démocratie » disait naguère Hollande, doit-on encore le rappeler ?), comment pouvez-vous encore regarder votre pays « tranquillement » ? Êtes-vous sûre que vos lunettes sont bien à votre vue ? Parce qu’Afflelou offre la 2e paire pour le prix d’une…

S’ensuit une série d’affirmations positives sur la loi travail (« Le compte personnel d’activité, c’est l’arme de la liberté pour réduire les inégalités ») et de chiffres traduisant le rebond de la France depuis 2012, notamment ces 70 000 emplois prétendument créés au dernier trimestre 2016 (comment vérifier ?). Applaudissements. « Je suis réformiste et très fière de l’être. A quoi sert-il de se prétendre révolutionnaire si c’est pour défendre le statu quo ? Je le dis à toutes ces âmes pures : à quoi sert-il d’incarner la gauche incorruptible si c’est pour faire la courte-échelle à la droite ? Qui en ferait les frais ? Nos concitoyens les plus fragiles ».

Les « âmes pures » ? Ai-je bien entendu ? L’adjectif « pur » me fait un peu frémir. Dans la bouche d’une politique, il ne m’évoque pas de bons souvenirs. Quant aux idées révolutionnaires, madame, elles ne prônent pas l’immobilisme mais le changement de système gauche/droite qui apparaît comme verrouillé et obsolète à bon nombre de jeunes (ah oui, vous ai-je dit que l’assistance était majoritairement composée de seniors et senioresses ?!)

« Nos camarades si critiques à notre endroit n’ont pas le monopole de la gauche. Allons-nous continuer longtemps, les uns à nous traiter de traîtres, les autres d’irresponsables ? À ceux qui ont voulu me donner des leçons de gauche pure (encore  ? Ça craint…), je réponds que je ne connais que la gauche et la droite. Ces deux-là s’affrontent depuis toujours. Et s’affronteront encore longtemps car la promesse d’une société juste, apaisante, égalitaire est de notre côté. » Ça va sans dire, l’apaisement est total, en effet. Même les policiers en ont marre de frapper…

« Je nous appelle collectivement au sursaut. Il est temps de faire entendre la voix des socialistes avec toi, cher Jean-Christophe. » A ce stade, je comprends parfaitement le but de ce meeting : Revendiquer la loi comme une réforme de gauche et réconcilier les militants PS. Enfin, ceux qui sont là… Car des frondeurs genre Pascal Cherki, je n’en vois point… Comment se réconcilier avec des absents ?

Cambadélis
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Arrive Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du Parti socialiste. Là, j’avoue avoir du mal à me concentrer et d’un parce que je commence à les trouver un brin condescendants, et de deux parce qu’autour de moi, tout le monde peste en disant « Camba n’a aucun charisme ». Et c’est vrai que « ce meeting était nécessaire pour souligner combien la gauche est différente de la droite », et que partir dans un grand speech contre la droite devant une assemblée acquise aux idées de gauche, c’est un peu comme vouloir apprendre à nager à Laure Manaudou.

Manuel Valls
Gazette Debout / DR

Manuel Valls est le clou du spectacle. Et là, franchement, il est bluffant de conviction : « Oui, nous nous sommes mal exprimés. Mais nous avons finalement négocié avec les syndicats réformistes. » Merci patron Laurent Berger (CFDT) ! « C’est un bon compromis. Nous poursuivrons le dialogue. » Ici, il cite tous les accords conclus. « J’assume cette loi parce qu’elle agit pour les salariés qui veulent avoir la parole. La démocratie, ce n’est pas la rue. C’est le vote. C’est un bon texte pour l’intérêt général. Nous ne serons pas le énième gouvernement qui recule. Il faut des syndicats dans les entreprises, mais chercher à opposer salariés et entreprises, c’est mal. Il faut décentraliser le rapport social. La loi est garante des droits. Le temps où l’on pouvait tout diriger est révolu. » Là, il parle des syndicats, pas du #49.3 !

« Pourquoi ce meeting ? Il y a de plus en plus de violences qui s’immiscent dans le débat public. S’attaquer au siège du parti, c’est inacceptable ! » Gloups… Et s’attaquer aux droits de ceux qui descendent dans la rue pour protester,  est-ce convenable ? «… Mais il y a aussi ce besoin d’oxygène, de réformes… Les autres ne rêvent que de pouvoir rester dans l’opposition pour se cantonner à la déclamation contre la droite, dans le bruit. Nous allons réussir pour les Français. Vive la France. Vive la République. »

A ce stade, tout le monde se lève et entonne « La Marseillaise » en chœur.

Final

Voilà c’est fini. J’ai un goût sucré-amer dans la bouche. Amer parce qu’ils sont complètement barricadés dans leur certitude de bien agir (ou alors ils font très bien semblant !). Ils choisissent leur public, abusent des moyens policiers pour se protéger face à de possibles contestations, et s’auto-congratulent. Sucré, parce qu’ils ne voient rien venir. Ou peut-être savourent-ils les derniers ersatz de leur gloire ? Grande compassion.

GAZETTE DEBOUT.

NB : Quelle est la pierre angulaire de l’article 2 (le plus contesté) de la loi El Khomri  ? La primauté de l’accord d’entreprise en matière de durée du travail devient le principe de droit commun. C’est notamment le cas en matière de fixation du taux de majoration des heures supplémentaires, où la priorité est donnée à l’accord d’entreprise, et non plus à l’accord de branche.

NB 2 : Je fais des photos floues, je sais…

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Une réponse à “Comment Gazette Debout s’est infiltrée dans un meeting ultra privé du parti socialiste

  1. L’impression d’assister à une thérapie familiale, ils se rassemblent pour se rassurer, se congratuler, se sentir soudé dans leurs propos mesquins qu’ils ne comprennent plus qu’eux mêmes d’ailleurs…
    Leur monde s’effondre à leurs pieds mais ils ne voient que leurs chausses sur mesure démesurées.
    Finalement, heureusement que les photos soient floues, elles le sont à leur image, des nantis à qui il manque quand même un détail: la raison.
    Merci Nuit Debout, et…banzaï!!!

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